La curiethérapie consiste à traiter des cancers à l’aide de sources radioactives placées au contact ou implantées dans les tumeurs. Pour le cancer prostatique, plusieurs techniques de curiethérapie ont été proposées. Nous détaillons ici celle qui est actuellement la plus utilisée et bénéficie d’une expérience de plus de trente ans aux Etats Unis (près de 20 ans en France) : l’implantation permanente de grains radioactifs d’iode 125.
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QUELLES SONT LES INDICATIONS ?
La curiethérapie est un traitement qui est réservé aux formes localisées et débutantes de cancer de la prostate. Les explorations effectuées (en particulier l’IRM pelvienne) ont donc contrôlé que votre maladie était strictement limitée à la prostate.
Par ailleurs, vous pouvez bénéficier de ce traitement si vous présentez un PSA ≤ 20 ng/ml, un score de Gleason (score histologique sur les biopsies qui vous ont été faites) ≤ 7 un scanner ou une IRM pelvienne ne montrant pas de ganglions pelviens augmentés de volume, une scintigraphie osseuse normale (cet examen n’est pas toujours pratiqué, le risque d’extension osseuse étant très faible à ce stade) et une IRM ne montrant pas de maladie en dehors de la prostate.
Pour des raisons techniques, un volume prostatique supérieur à 40-50 cm3 constitue un facteur limitant, pouvant nécessiter la prise d’un traitement médical au préalable.
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QUELLES SONT LES MODALITES DU TRAITEMENT ?
La curiethérapie se déroule au cours d’une hospitalisation brève, de l’ordre de 48 heures. En résumé, le premier jour, votre hospitalisation est prévue en début ou fin d’après-midi. Le lendemain, après un lavement évacuateur, vous êtes transporté au bloc opératoire.
L’application des grains radioactifs se déroule sous anesthésie générale et dure en règle générale de 1h00 à 1 heure 30. Tous les renseignements sur cette anesthésie et les suites immédiates du traitement vous ont été donnés préalablement par l’anesthésiste avec qui une consultation systématique est prévue avant l’hospitalisation.
L’implantation des grains est systématiquement réalisée par un duo radiothérapeute et urologue. L’équipe comporte aussi un physicien (qui va assurer le calcul en temps réel de la dose d’irradiation dans votre prostate), ainsi que tout le personnel au bloc opératoire.
Dans un premier temps, sous anesthésie générale, est mise en place une sonde urinaire puis une sonde d’échographie endorectale destinées à visualiser votre prostate pendant toute l’implantation.
Une série d’aiguilles est ensuite implantée dans le périnée, entre les bourses et l’anus, sous surveillance échographique.
A l’aide de ces aiguilles, les grains d’iode 125 sont implantés directement dans votre prostate.
Le physicien suit en temps réel et enregistre le positionnement précis de chaque grain. Le nombre total de grains implantés se situe habituellement entre 50 et 100.
En fin d’application, les critères de qualité de ce type d’application doivent être respectés : le « V100 », pourcentage du volume prostatique recevant 100 % de la dose prescrite, doit être le plus proche possible de 100 %, et la « D90 » dose reçue par 90 % de la prostate, doit être supérieure à 145 Gy.
A la sortie du bloc opératoire, seule la sonde urinaire est laissée en place (les aiguilles ont été retirées au fur et à mesure de l’implantation des grains).
Après un temps en salle de réveil, vous être reconduit dans votre chambre après une absence totale de 3 heures environ. Les douleurs post-implantations sont rares, mais un traitement antalgique simple peut être prescrit à votre demande si besoin.Le lendemain, la sonde urinaire est ôtée vers 6 heures du matin et vous pouvez sortir dès que vous avez uriné 2 ou 3 fois.
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QUELLES SONT LES PRECAUTIONS A PRENDRE ?
Après votre sorite, il vous est demandé de prendre quelques précautions.
Exceptionnellement un ou plusieurs grains peuvent être évacués dans vos urines ou votre sperme.
Cette perte ne modifie pas la qualité du traitement. Mais ces grains doivent si possible être récupérés.
Pour cela, vous devez donc filtrer vos urines pendant une dizaine de jours. Le plus simple est d’utiliser à domicile une gaze sur un bocal et une passoire du type passoire à thé en dehors de chez soi. Les rapports sexuels sont déconseillés durant la première semaine suivant l’implantation (risque de migration de grains dans le sperme ; par contre, il est ensuite possible de reprendre rapidement une activité sexuelle normale. Pour les 5 premiers rapports sexuels après l’implantation ; ou une période de 1 à 2 mois ; vous devez vous protéger (préservatif) afin de pouvoir récupérer les possibles grains éjaculés.
Si vous retrouvez un grain dans vos urines ou dans votre sperme, vous ne devez pas le toucher avec les doigts. Il est alors possible d‘utiliser une petite cuillère ou une pince à épiler pour récupérer le grain et le placer dans le container qui vous a été donné pendant l’hospitalisation.
Les grains irradient de façon très localisée. La quantité de radiations sortant du corps est infime ; vous n’êtes donc pas dangereux pour votre entourage. Il faudrait plusieurs centaines d’heures au contact du pubis pour délivrer la dose annuelle maximale autorisée par la loi (déjà très faible car elle correspond à environ la moitié de la dose annuelle donnée par la radioactivité naturelle). Par ailleurs, cette très faible radioactivité n’est pas transmise aux objets utilisés, même métalliques.
Il est malgré tout demandé, par souci d’(hyper)sécurité, de ne pas prendre les jeunes enfants sur le genoux plus de quelques minutes par jour, et de respecter un minimum de distance avec les femmes enceintes ; à un mètre, il n’existe aucune limitation .
Si vous devez subir une intervention chirurgicale sur l’abdomen ou le pelvis, vous devez prévenir le chirurgien afin d’éviter une irradiation des mains de ce dernier. Le chirurgien devra alors prendre contact avec l’équipe ayant effectué la curiethérapie. Il peut être demandé, par exemple, de retarder d’au moins six mois une intervention sur les hanches ou une colonoscopie.
La très faible radioactivité des grains implantés dans votre prostate (voir plus haut) peut être détectable par certains portiques hypersensibles, dans des lieux spécifiques comme les centres de recherches nucléaires et certains aéroports, pour l’instant seulement aux USA et en Russie. Un certificat bilingue (français-anglais) vous est alors remis en cas de voyages dans ces pays.
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QUELS SONT LES EFFETS SECONDAIRES ?
Les effets secondaires de la curiethérapie vous ont été détaillés lors de la première consultation.
Il existe trois périodes dites à risque :
• Les premiers jours après l’implantation
Vous pouvez présenter des difficultés à uriner, voire exceptionnellement un blocage complet (rétention urinaire). En cas d’urgence, vous devez consulter à l’hôpital le plus proche de chez vous et contacter le centre ayant effectué l’implantation. Cette complication, due au traumatisme de l’application, ne survient que dans un à huit pour cent des cas. En cas de symptômes gênants, vous pourrez utiliser l’ordonnance spécifique détaillée qui vous a été remise à la sortie de l’hôpital.
Une infection, urinaire ou prostatique, est très rare mais possible. Une analyse d’urine et un antibiotique prescrits par votre médecin traitant résolvent, en règle générale, rapidement le problème.
• Environ 1 mois après l’applicationLes signes urinaires qui peuvent survenir vous ont déjà été décrits lors de la première consultation. Dans environ 40 % des cas, les patients urinent plus d’une fois toutes les deux heures. Les blocages totaux (rétentions) sont exceptionnels.
Un traitement médical est prescrit systématiquement afin d’améliorer les symptômes. Il doit être pris dès le début des troubles. Ces signes, principalement urinaires, vont durer en moyenne 4 mois, puis disparaître complètement. Pour certains, les symptômes durent plus longtemps, mais finissent toujours par disparaître.
Quelques symptômes rectaux (une gêne rectale, voire d’exceptionnelles brûlures) sont possibles, mais ils sont rarement gênants ou sévères.
Enfin, il faut signaler que quelques sensations de brûlures à l’éjaculation sont fréquentes à cette période.
• A long termeDes poussées de troubles urinaires ultérieurs sont possibles. Le plus souvent, cette ré-aggravation se situe 18 mois environ après l’application. Les signes réapparaissent parfois identiques à ceux des premiers mois, mais ils sont en général plus modérés. Ils disparaissent spontanément, mais la reprise d’un traitement médical est souhaitable. Parfois, le PSA va lui aussi augmenter dans le même temps : cette ré-augmentation (ou « rebond ») survient dans près d’un tiers des cas et ne présente aucun signe de gravité.
Des troubles rectaux peuvent aussi être observés. Ils sont rares et le plus souvent seulement gênants, se traduisant par quelques sensations de brûlures, du prurit ou des faux besoins.
Même si l’un des principaux avantages de la curiethérapie est de respecter la sexualité, des difficultés sexuelles peuvent apparaître.Pour les problèmes érectiles, votre médecin traitant ou votre cardiologue pourront vous conseiller un traitement adapté.
Ces modifications sont efficaces après curiethérapie dans la majorité des cas. Au total, après curiethérapie prostatique, plus de 80 % des patients qui avaient des rapports sexuels avant l’implantation conservent leur activité, sans ou avec une aide médicamenteuse.
Des modifications du volume et de l’aspect du sperme sont fréquentes, le plus souvent avec une importante diminution du volume de l’éjaculat.
En revanche, vous restez potentiellement fertile. En effet, des grossesses après curiethérapie ont déjà été décrites. Une méthode contraceptive est donc souhaitable.